ACCORD CONCLU ! L'UE VA CRIMINALISER LES ATTEINTES GRAVES À L'ENVIRONNEMENT « COMPARABLES À UN ÉCOCIDE »

Résumé :

  • L'UE a convenu de créer une nouvelle infraction visant à sanctionner les crimes les plus graves contre l'environnement. 

  • La nouvelle loi vise à prévenir et à sanctionner les « cas comparables à un écocide ».

  • Cette décision historique intervient après des mois de négociations entre le Conseil européen, la Commission et le Parlement. Elle reflète la recommandation du Parlement européen, formulée au début de l'année, de s'attaquer aux « crimes de niveau écocide ».

  • Le texte sera officiellement adopté dans les mois à venir, mais l'accord politique le plus important a été conclu.


L'UE a décidé d'inscrire dans la loi une nouvelle infraction visant à sanctionner les crimes les plus graves contre l'environnement. 

Jeudi après-midi, l'Union européenne a approuvé le renforcement de sa Directive relative à la protection de l'environnement par le droit pénal. La directive comprendra désormais une disposition permettant de traiter directement des cas spécifiques graves de destruction des écosystèmes, notamment la destruction des habitats et l'exploitation illégale des forêts.

Bien que le texte du dispositif de la directive s'abstienne d'inclure le terme « écocide », l'UE a manifestement pris très bonne note du texte proposé par le Parlement européen[1] au début de l'année pour lutter contre les crimes de type « écocide », ainsi que du nombre croissant de projets  de loi sur l'écocide déjà proposés et et qui se développent tant en Europe que dans le reste du monde.

Le texte final a été publié ce jeudi après plusieurs mois de trilogues (négociations entre le Conseil européen, la Commission et le Parlement) envisageant, entre autres, l'établissement d'une « infraction qualifiée » visant à prévenir et à punir les atteintes les plus graves à l'environnement, y compris, comme le précisent les considérants qui l'accompagnent, « les cas comparables à l'écocide ». Le texte sera formellement adopté dans les mois à venir, mais l'accord politique le plus important a été atteint.

Le texte suggéré par le Parlement européen avait fait l'objet d'un vote unanime de la commission des affaires juridiques en mars 2023, proposant que « les États membres veillent à ce que tout comportement causant des dommages graves, qu'ils soient étendus ou durables ou irréversibles, soit considéré comme une infraction d'une gravité particulière et sanctionnée comme telle conformément aux systèmes juridiques des États membres ». 

Cette proposition rejoint celle du groupe d'experts indépendants réunis par la Fondation Stop Ecocide en 2021[2] qui avait proposé une définition de l'écocide en tant que crime international, suscitant un intérêt croissant de la part des gouvernements, des juristes, des universitaires et des médias dans le monde entier.

Le texte final de l'UE est conforme à l’esprit de  la définition internationale et c’est la première fois qu'un texte législatif au niveau européen reconnaît la destruction massive de la nature comme un acte criminel en tant que tel.

Le public manifeste un intérêt croissant et incontestable pour la reconnaissance de l’écocide et des crimes commis au même niveau.  Ainsi, une coalition de politiciens, d'ONG et de représentants de la société civile fait campagne depuis plus d'un an pour l'inclusion de cette notion dans la directive. Une pétition en ligne organisée par WeMoveEU et Avaaz a d’ailleurs recueilli plus de 616 000 signatures[3]. 

Jojo Mehta, cofondatrice et directrice exécutive de Stop Ecocide International, a déclaré :

« Nous sommes ravis de ce résultat. Le texte approuvé est une étape extrêmement importante et une victoire massive pour la nature, renforçant de manière significative la protection de l'environnement par le biais du droit pénal dans l'ensemble de l'UE.

Le Parlement européen a fait preuve d'un véritable leadership en mars en défendant un texte fort, et les négociations avec la Commission et le Conseil ont abouti à une directive qui aidera véritablement les États membres à traiter les atteintes à l'environnement de manière beaucoup plus sérieuse.  

Il s'agit là d'un résultat très important, qu'il convient de saluer sans réserve, et nous pouvons constater, au vu de l'essor rapide de l'initiative relative à la loi sur les écocides, que les États européens ne tarderont pas à s'engager plus avant dans ce domaine dans leurs propres juridictions. 

En effet, je ne doute pas qu'avec cette orientation rapidement établie, ce n'est qu'une question de temps avant que l'écocide ne soit reconnu dans le droit pénal à tous les niveaux. »

Marie Toussaint, députée européenne, qui joué un rôle essentiel dans les négociations, ajoute :

« Le texte adopté peut ouvrir une nouvelle ère du contentieux environnemental en Europe, car nous avons obtenu une victoire fondamentale qui devrait s'étendre au-delà de nos frontières. Dans le contexte politique européen, ce texte est une référence pour tous ceux qui défendent l'environnement en justice et luttent contre l'impunité des entreprises criminelles qui bafouent trop souvent les lois et œuvrent aujourd'hui au détricotage de la démocratie environnementale en Europe. 

La criminalité environnementale explose dans le monde, elle est désormais considérée comme aussi lucrative que le trafic de drogue et contribue à détruire les conditions de vie sur terre. Avec cet accord, l'Union européenne adopte une des législations les plus ambitieuses au monde. Nous continuerons à nous battre pour que l'on ne puisse plus jamais nuire aux êtres vivants au nom du profit. Il est maintenant essentiel que les États membres de l'UE proposent un amendement visant à inclure le crime autonome d'écocide dans le statut de Rome de la Cour pénale internationale. »

Giulio Carini, responsable de la communication chez WeMove Europe à déclaré :

« Nous avons fait un pas de plus vers l'arrêt de la destruction de notre planète. Avec la proposition d'aujourd'hui, nous avons obtenu un texte qui ouvre la voie à la protection de la nature par le droit pénal. Cette avancée est le résultat de la pression exercée par les citoyens, puisque plus de 600 000 personnes à travers l'Europe ont demandé à l'UE de faire de l'écocide un crime. »

Cette année, des projets de loi sur l'écocide ont été proposés ou progressent en Belgique, aux Pays-Bas, en Italie et en Espagne. Stop Ecocide International estime que chaque nouvelle proposition de loi sur l'écocide envoie un signal aux décideurs politiques de l'UE : il existe un véritable appétit politique et culturel pour une action juridique significative visant à prévenir et à punir les dommages les plus graves causés à la nature.